L’étoile du shérif ⭐️

L’estran. Un monde d’apparence minérale et pourtant grouillant de vie pour qui veut bien y consacrer un peu de temps et de curiosité. Un monde extrême qui met au défi tous les êtres vivants, animaux, algues, lichens, de survivre à ses conditions fluctuantes et violentes. 

Pourtant, nous avons vu, dans un précédent billet, que les habitants de l’estran sont nombreux, pour ne pas dire innombrables !
24 phylum, des algues aux poissons, en passant par les les tuniciers ou les phoronidiens ! Et combien d’espèces ? Ils sont innumérables pour le béotien, et leurs identités sont fort difficiles à appréhender. Car, si certaines espèces ont eu l’heur de se voir attribuer un nom vernaculaire (coucou le bigorneau, l’étrille, le dormeur, l’huître et la moule, le cormaillot, les patelles et les balanes !) la plupart ne disposent que d’une appellation scientifique, toujours en latin, s’il vous plaît ! C’est très chic, mais évidemment fort difficile à mémoriser. 

Nous avons fait la connaissance, récemment, d’un joli petit échinoderme qui se croyait à l’abri d’un petit rocher que l’un d’entre nous, plus curieux que les autres, retourna. Son nom vernaculaire est étoile de shérif, ou astérie pentagonale. Son nom latin est Asterina gibbosa. C’est une étoile de mer, de petite taille, fort jolie au demeurant. Sa robe peut être verte, violette, rouge, orange, jaune ou brune, unie ou marbrée.  « La nôtre » était verte avec de petits éclats jaunes, fort seyants. Ce que notre guide nous appris sur le mode de déplacement de cet animal ne manquant pas de nous interloquer.

Les étoiles de mer, en effet, se déplacent en rampant sur leurs nombreux pieds ambulacraires, rien de bien stupéfiant, me direz-vous ! Mais votre curiosité ne manquera pas d’être férocement piquée si je vous dis que ces déplacements mobilisent en même temps un système hydraulique et un système chimique associant successivement colle et dissolvant, !

La chimie d’abord !

Les pieds ambulacraires de l’anémone , appelés podia (podion au singulier) sont les organes locomoteurs de l’étoile de mer. Au centre de la face inférieure du disque central se trouve la bouche, où se rejoignent les « sillons ambulacraires » des bras. Chacun de ces sillons radiaux porte entre 2 et 4 rangées de podia. Contrairement à une idée très répandue (et longtemps admise par les scientifiques), les extrémités des podia ne sont pas des ventouses : ils ne sont généralement pourvus d’aucun système de succion, et ne disposent pas d’une cavité à vide. Leur pouvoir adhérant est dû à la sécrétion d’une puissante colle sécrétée par des cellules spécialisées. Lors du détachement, ces cellules sécrètent un dissolvant, qui dissout la structure collante et permet la libération du podion. L’extrémité distale du podion n’est donc en fait un simple élargissement qui sert à augmenter la surface d’adhésion au substrat (elle est d’ailleurs généralement plate et pas concave).  L’adhésion par colle plutôt que par succion constitue un avantage indéniable, car elle permet d’escalader des parois rugueuses, quand les ventouses ne peuvent coller que sur des surfaces parfaitement lisses. La colle particulièrement efficace que sécrètent les échinodermes est étudiée par des ingénieurs, en vue d’en tirer des applications industrielles sur le modèle du biomimétisme.

L’hydraulique ensuite !

Ces podia sont mobilisés, non par des muscles, mais par un système hydraulique : Le corps de l’étoile de mer renferme un système de chambres remplies d’eau de mer, le système aquifère ou ambulacraire, qui communique avec le milieu extérieur par un ou plusieurs pores aquifères. Ces pores sont regroupés sur la plaque aquifère ou « madréporique » qui permet de faire varier la pression hydraulique du système. Par des changements de pression dans ces chambres, ce système permet les mouvements des podia.

Ces sillons ambulacraires sont protégés de part et d’autre par une rangée de plaques armées de piquants. Les podia assurent une lente reptation ou le glissement sur les surfaces dures, le retournement si nécessaire, ou l’enfouissement pour les espèces qui vivent enterrées dans le sédiment. Voici une Vidéo montrant le déplacement d’une étoile de mer.  

Etonnant, non ?

BIBLIOGRAPHIE

  1. Les échinodermes. Université Catholique de Louvain. voir ici 
  2. Les astéries. Wikipédia
  3. Les podia. Wikipédia

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