Quelle belle et intéressante randonnée que celle qui nous mena, hier, sur une dizaine de kilomètres, de la jolie bourgade de la Vicomté-sur-Rance, au port du Lyvet, et au Châtelier avant de nous ramener au bercail.
La randonnée fut belle par les paysages somptueux qui s’offrirent à nos yeux, les sous-bois luxuriants, les rives toujours éblouissantes de la Rance, les reflets d’argent sur l’eau en contrebas, les chants d’oiseaux innombrables, les luxuriantes couleurs des orchidées tachant les prairies, les fragrances des ajoncs et de l’aubépine, et les champs d’orge ondulant sous le vent.
La randonnée fut intéressante car, sur le chemin, trois panneaux d’information nous firent, c’était inattendu, une véritable leçon d’histoire ! Permettez-moi de vous la bailler belle !
LE PONT DE LESSARD
Le viaduc de Lessard fut construit en 1879 pour relier Brest à Cherbourg par le train. Le tablier métallique initial, qui enjambait la Rance, chef d’oeuvre d’ingénierie, fut détruit par les bombardements allemands à la fin de la seconde guerre mondiale, le 2 août 1944. Il a été remplacé, en 1950, par une grande arche centrale en béton armé, très spectaculaire. L’originalité de l’ouvrage provient du maintien des anciennes piles et arches en granite, harmonieusement combinées avec la structure centrale en béton.
La construction du pont, en 1879, a donné lieu à un passionnant article de l’hebdomadaire « Le Monde illustré » disponible en ligne sur la bibliothèque numérique Gallica (magie de l’internet). Cet article fut publié deux semaines après l’événement, le temps nécessaire, probablement, à la réalisation du magnifique dessin à la plume illustrant le texte. Le temps, décidément, ne s’écoulait par à l’époque comme il s’écoule aujourd’hui… Les photographes de presse n’existaient pas encore… Source
Sur l’illustration de cet article, on aperçoit un bateau à aubes et à vapeur, ainsi qu’un canot avec deux nageurs aux avirons. Mais, les bâtiments les plus étonnants qui naviguaient sur la Rance et donc sous ce pont, étaient les chalands. Ce fut la seconde découverte de notre randonnée !
LE CHALAND DE RANCE
Le Chaland de Rance était la variante d’un robuste lougre de cabotage en mer qui fut adapté à la navigation en rivière et en canal pour emprunter les écluses et joindre Rennes. La présence de la quille limitant la charge transportée, il resta lié (à part quelques exemplaires envoyés en Basse Loire ) à La Manche, à La Rance et aux Canal d’Ille et Rance. Il fut plus tard supplanté par le modèle de chaland Nantais qui pouvait porter davantage de frêt car il n’avait pas de quille. La concurrence de la voie ferrée devint aussi plus importante, et les chalands de Rance disparurent au cours de la première moitié du XXe siècle. Le dernier fut sans doute le LOUIS qui avait été motorisé pour transporter du sable vers le port de Dinan. Le LOUIS fut construit en 1917 par le chantier Tranchemer de La Richardais. De type bois ponté, il était constitué de 2 cales et servait à l’acheminement du sable pour les entreprises de construction, aux ponts et chaussées et aux maraîchers rennais. Il mesurait 26,10 mètres de long, 4,6 m de large, son tirant d’eau était d’1,6 m, et il déplaçait 140 tonneaux.
L’ÉPERON BARRÉ DU CHÂTELIER
La troisième découverte, fut celle de l’Éperon barré du Châtelier que nous indiqua la pancarte du sentier de randonnée. Elle nous projette plus avant encore dans le temps passé. Nous marchâmes sur les pas de nos ancêtres les gaulois !
Repéré en 1977 lors d’une prospection aérienne, l’éperon barré du Châtelier est un promontoire de près de 6 hectares qui domine une courbe de la Rance à la limite des effets de marée. Côté terre, il est coupé par un profond fossé rectiligne de 300 mètres de longueur, de 15 mètres de largeur et de 8 mètres de profondeur. Il s’agit d’un système de défense ou de refuge typiquement gaulois, probablement édifié par les Coriosolites, avant la conquête de la Gaule par les romains. Un gué le reliait à Taden, et une voie romaine le longeait à sa partie sud. Aucun vestige n’y a jamais été découvert.
Il est d’autres éperons barrés dans la région : la pointe de Cancaval en Pleurtuit et la pointe du Meinga en Saint-Coulomb. Pour ce dernier, il n’y a pas de fossé mais un talus en pierres sèches.
Pour en savoir davantage sur les éperons barrés, voir cet article de Wikipédia
Ainsi, tandis que nous cheminions sur ces sentiers de randonnée, en pleine nature, admirant les paysages, la faune et la flore, l’Histoire vient à notre rencontre. Éblouissant !