Une friture d’orobanches, ca vous branche ?

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J’ai fait leur connaissance, un beau jour d’été, au cours d’une sortie botanique dédiée aux orchidées. Je n’en avais jamais entendu parler auparavant, ni ne les avais jamais remarquées. Elles sont pourtant connues depuis l’antiquité, elles sont fréquemment observées et elles peuvent même se manger. Qui donc sont-elles ? Les orobanches !

UN PEU DE BOTANIQUE…

Les orobanches sont des plantes herbacées de petite taille (10 à 60 cm), sans chlorophylle, de la famille des Orobanchacées comprenant environ 150 espèces originaires des régions tempérées de l’hémisphère nord.  On les reconnaît aisément à leur tige écaillée, dressée, de couleur jaune paille complètement dépourvue de chlorophylle, généralement non ramifiée, aux feuilles en forme d’écailles triangulaires. Cette tige porte de petites fleurs bilabiées jaunes, blanches ou bleues groupées en épi terminal de 10 à 20 fleurs (à l’exception d’Orobanche uniflora aux fleurs solitaires). En dehors de la période de floraison, aucune partie de ces plantes n’est visible à la surface du sol. Les fleurs apparaissent tardivement et marquent la fin de la vie de la plante. Généralement, les orobanches fleurissent au début du printemps.

Ces plantes psammophytes (adaptée aux milieux sableux) sans chlorophylle dépendent entièrement de plantes-hôtes pour les éléments nutritifs dont elles ont besoin : ce sont des holoparasites. Les semences d’orobanches émettent après la germination une pousse à l’aspect de racine qui se fixe sur les racines des plantes-hôtes les plus proches, et dès lors la plante reçoit l’eau et les éléments nutritifs de la plante-hôte.

Certaines espèces sont très spécialisées et dépendent d’une seule espèce-hôte, tandis que d’autres sont capables de parasiter plusieurs espèces ou genres. Plusieurs espèces d’orobanches sont des nuisances pour les plantes de grande culture dont elles affectent le rendement : L’orobanche du chanvre, Orobanche ramosa, parasite, entre autres, le tournesol, les pommes de terre, aubergines, poivrons, haricots, choux, piments céleris. O. cumana est une autre espèce d’orobanche parasitant le tournesol.

UN PEU D’HISTOIRE…

Leur nom vient du grec ancien ὀροβάγχη, orobágkhê, composé de ὄροβος [órobos, sorte d’ers ou de vesce] et de ἄγχω, [ágkhô, étrangler, étouffer] en raison du parasitisme de ces plantes. En d’autres termes, les orobanches sont des plantes qui “étouffent” les légumes. Pline l’Ancien, au premier siècle, écrivit : « Nous avons appelé orobanche une herbe qui tue l’ers et les légumes. D’autres la nomment cynomorion, à cause de sa ressemblance avec les parties génitales du chien. La tige n’a point de sang; les feuilles sont rougeâtres. On la mange ou crue ou cuite sur le plat, quand elle est tendre.»

Théophraste, philosophe de la Grèce antique né vers 372 av. J.-C. à Eresós (Lesbos) et mort vers 288 av. J.-C. à Athènes, élève d’Aristote était botaniste et naturaliste, polygraphe et alchimiste: il caractérisa et décrivit les orobanches. Dioscoride, quant à lui,  était un médecin et botaniste grec qui vécut entre les années 20 et 40 après J.-C., probablement à Anazarbe en Cilicie, une région située dans le sud de la Turquie actuelle . Il est connu pour son ouvrage « De Materia Medica », qui comprenait des informations sur les plantes médicinales et leurs utilisations, ainsi que des descriptions de diverses espèces animales et minérales. Cette œuvre était considérée comme une référence en matière de botanique et de médecine jusqu’à la Renaissance, et a été traduite en plusieurs langues européennes. Dioscoride a traité des orobanches, fournissant des détails sur leur description, leurs propriétés médicinales et les avantages potentiels de leur culture.

UN PEU DE CUISINE…

Au début du XIXe siècle, L.-C.-A. Frémont, rédigea une longue note sur l’orobanche de Dioscoride, contenant sa description, ses propriétés, les avantages qu’on peut retirer de sa culture, la preuve que cette plante n’est point parasite, des conjectures sur l’orobanche de Théophraste, et contesta les écrits de ces auteurs antiques, lesquels, d’après lui confondaient cuscutes et orobanches. Une chose cependant sur laquelle tous s’accordent est le fait que l’orobanche est comestible. La note de Frémont ayant même pour objectif d’en inciter la culture à grande échelle. Plus près de nous, François Couplan, spécialiste des plantes sauvages comestibles, nous dit qu’à l’île d’Yeux on suçait les pousses d’orobanches pour leur goût sucré. En Europe on fait blanchir certaines espèces à l’eau bouillante salée et on les consomme au printemps comme les asperges. Dans les Pouilles on les manges frites après les avoir fait bouillir puis tremper dans l’eau une journée entière…

Ressources documentaires

  1.  Discoride, médecin et botaniste grec.
  2. Théophraste. Wikipédia
  3. Frémont L.-C.-A. Note sur l’orobanche de Dioscoride, contenant sa description, ses propriétés, les avantages qu’on peut retirer de sa culture, la preuve que cette plante n’est point parasite, des conjectures sur l’orobanche de Théophraste, etc., Edition originale : 1807
  4. Les orobanches. Wikipédia

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