Ortie subvertie !



Elle est de toutes nos sorties dans la nature, randonnées, ou observations naturalistes. Qu’il fasse beau ou qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige, elle est présente, dans les fossés ou sur les talus, dans les friches, les parcs et les jardins. Nous avons tous, une fois dans notre vie, expérimenté son brûlant contact. Vous aurez deviné que nous brosserons aujourd’hui, à gros traits malhabiles, le portrait de l’ortie. 

En Europe de l’Ouest, les deux espèces les plus courantes de ces plantes de la famille des Urticacées, et du genre Urtica, sont la grande ortie (Urtica dioica, cinquante centimètres à un mètre, vivace) et l’ortie brûlante (Urtica urens, moins de cinquante centimètres, annuelle).

Loin de se résumer à ses compétences urticantes, l’ortie est une plante qui mérite notre considération, car elle est à bien des égards fort étonnante, pour ne pas dire épatante.

En préambule, je la trouve élégante, ses feuilles dentelées et élancées composant de luxuriants tapis végétaux. Maquillée de givre, par les frais matins d’hiver, elle brille de de mille feux !

Ses pouvoirs urticants sont connus de tous. Les poils urticants, qui recouvrent presque toutes les feuilles et la tige contiennent un mélange d’histamine, d’acétylcholine et de sérotonine qui irrite la peau au moindre contact de la plante. De l’acide formique (l’arme de défense des fourmis et des abeilles) est également présent dans ce cocktail chimique, mais il joue un rôle mineur dans la réaction cutanée de l’agresseur agressé.

Les propriétés nutritionnelles de l’ortie sont moins connues. La soupe d’ortie était, autrefois, un mets de choix pour les plus modestes, mais n’est plus guère consommée de nos jours. L’ortie n’est pas référencée dans la base Ciqual de l’ANSES, mais différentes sources laissent à penser que l’ortie contient de nombreux nutriments intéressants  :

  • Des minéraux et oligo-éléments (silice, potassium, calcium, fer, magnésium, manganèse, soufre, zinc, etc.).
  • Des vitamines (vitamine A, vitamines du groupe B, vitamine C, vitamine E, vitamine F, vitamine K, vitamine P).
  • Des protéines (30 % de sa masse sèche) composées de 18 acides aminés différents (sur les 20 existants), dont les 8 acides aminés essentiels (isoleucine, leucine, lysine, méthionine, phénylalanine, thréonine, tryptophane et valine). A titre de comparaison, les céréales sont toutes déficientes en lysine (certaines également en tryptophane), tandis que les légumineuses sont déficientes en méthionine.

L’ortie a des compétences écosytémiques : sur les sols retournés, certains gravats et sédiments riches en matière organique, sur les sols violemment remués, très déstructurés et sur les sols et friches pollués par les nitrates, les orties, après les coquelicots, comptent parmi les toutes premières plantes à couvrir le sol, et jouent un rôle important dans le cycle de l’azote en prélevant une partie des nitrates.

⚠️ Mais ATTENTION, il arrive qu’elles accumulent, dans leurs tissus, les polluants dont l’homme arrose les campagnes, les métaux lourds en particulier. Par conséquent, pour confectionner une délicieuse soupe d’ortie, évitons de faire notre marché au bord d’une route ou d’une décharge.

Les massifs d’orties constituent un habitat propice aux insectes et contribuent à la biodiversité. Protégés par leur petite taille et leur carapace, les insectes sont nombreux à apprécier les orties. Une trentaine d’espèces ne vivent quasiment qu’à ses côtés, notamment les paons du jour, vulcains, petites tortues, cartes géographiques ou robert-le-diable. Les chenilles de ces papillons se nourrissent de feuilles d’orties. Les dégâts occasionnés sont, modérés, et ne menacent aucunement la plante.

L’ortie est une des alliées du jardinier : quand elle se décompose, elle libère de l’azote, le fer et le potassium, les mettant à disposition des micro-organismes du sol et des végétaux. Ainsi, l’ortie constitue-t-elle un précieux engrais (purin d’ortie ou broyât séché).

Verrez-vous, comme ce fut le cas pour moi, l’ortie d’un œil nouveau, après avoir pris connaissance des vertus de cette plante ? Elle est, certes, brûlante, mais elle est aussi épuratoire, nourrissante et fertilisante ! Vos commentaires seront les bienvenus !

Sources

  1. La Grande ortie. BNF – Gallica
  2. Petite ethnobotanique de l’ortie. Aymeric de Kérimel
  3. L’herbier d’Halbran. Les poils urticants de l’ortie
  4. Les nombreuses vertus de l’ortie. Salamandre
  5. Mise en valeur du potentiel nutritionnel et thérapeutique de l’ortie dioïque. Hegel, 2016

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