Chapeau, les champignons !

Le 9 février, à Saint-Lunaire, une conférence fort intéressante fut proposée au grand public par la Communauté de Communes Côte d’Émeraude, qui avait pour thème : « Découverte des champignons et de leurs écosystèmes. » avec M. Pascal PEUCH, président de la Société Mycologique de Rennes.
Le sous-titre en était alléchant : « À la fin de cette présentation, vous ne direz plus « la faune et la flore », vous ajouterez en bonne place: « la fonge ».

Voici ce que j’ai retenu de cet exposé, didactique et humoristique !

L’être vivant le plus grand du monde est un champignon : Armillaria solidipes. Le spécimen le plus grand découvert mesurait 8,9 km2 et était situé dans l’Oregon aux États-Unis. Il a été estimé qu’il était vieux de 2400 ans. L’être vivant le plus lourd du monde est Pando : une colonie d’arbres située dans l’Utah, aux États-Unis. Elle est considérée comme l’organisme vivant le plus lourd et le plus âgé de la planète, avec un poids estimé à 6 000 tonnes et un âge de 80 000 ans.

Règnes animal, végétal… et fongique

Les champignons, ne sont ni des animaux, ni des végétaux !

  • La paroi des champignons est constituée de chitine, molécule que l’on retrouve chez les insectes et les crustacés (constituant essentiel de leur carapace),  quand la paroi des végétaux est constituée de cellulose.
  • Les champignons stockent leur énergie sous forme de glycogène, comme les animaux (chez l’homme par exemple, le glycogène est la réserve de sucre « prête à l’emploi » de l’organisme, il est stocké dans le foie et les muscles squelettiques) ; les végétaux, quant à eux, stockent leur énergie sous forme d’amidon)
  • Les champignons sont des organismes hétérotrophes pour le carbone, c’est-à-dire qu’ils doivent se nourrir de matière organique puisée dans leur milieu, car ils ne savent pas la fabriquer eux-mêmes, contrairement aux végétaux qui, grâce à la photosynthèse, élaborent leur propre matière organique (sucres) à partir du dioxyde de carbone de l’air et de l’eau du sol.
  • Les champignons sont capables de dégrader des molécules complexes pour en tirer du carbone et de l’énergie, alors que les végétaux ne savent utiliser que des molécules simples.

Les champignons sont, en quelque sorte,  des tunneliers: leurs hyphes se développent, se multiplient et, ainsi leurs filaments microscopiques se développent en longueur, fusionnent avec d’autres entités de même espèce pour créer un réseau sous terrain très étendu. Ce qu’on appelle couramment « champignon » n’est en fait que la « fructification » temporaire et visible, le sporophore d’un organisme à caractère plus durable et plus discret, le macromycète, dont la structure habituellement filamenteuse constitue le mycélium, formé de filaments invisibles à l’œil nu lorsqu’ils sont isolés. 

Les champignons sont des chimistes très compétents, producteurs d’enzymes permettant de casser les molécules complexes (cellulose, lignite, etc) pour en extraire les sucres (hydrates de carbone), sources d’énergie. Ils sont également producteurs d’antibiotiques les protégeant ainsi que leurs hôtes symbiotiques des attaques bactériennes.

Ils peuvent être autonomes, parasites ou symbiotes.

Les champignons ne possèdent pas la capacité qu’ont les plantes de synthétiser leur propre nourriture grâce à l’énergie solaire. Ils sont dépourvus de cette chlorophylle, qui permet aux végétaux de capter l’énergie lumineuse produite par le soleil et de fabriquer des sucres à partir du carbone présent dans l’air (photosynthèse). Pour cette raison, les champignons ont dû développer des modes de vie particuliers : la symbiose, le saprophytisme et le parasitisme. 

  • La symbiose : Un grand nombre de champignons qui croissent sur le sol en forêt sont intimement liés aux arbres par symbiose. Cette association, nommée mycorhize, se fait entre les extrémités des racines d’un arbre et l’appareil végétatif d’un champignon. La mycorhize bénéficie aux deux organismes en cause : il s’agit d’un échange d’éléments nutritifs, l’un fournissant à l’autre ceux qu’il ne peut synthétiser ou extraire du sol par ses propres moyens. De façon générale, le champignon aide l’arbre à puiser des éléments minéraux et de l’eau dans le sol; en échange, l’arbre fournit des sucres au champignon.
  • Le saprophytisme : est un autre mode de vie important chez les champignons. C’est le cas des espèces qui croissent sur les pelouses, le bois pourri, les excréments, etc. Dans ce cas, le rôle joué par le champignon est la décomposition. Il digère la matière organique et permet ainsi aux éléments nutritifs de retourner à la terre.
  • Le parasitisme des champignons peut être de plusieurs types, allant de l’espèce qui attaque un hôte (arbre, plante, insecte…) en pleine santé, puis vit à ses dépens sans le tuer, jusqu’à celle qui ne cause du tort qu’à un hôte déjà malade et qui par conséquent, hâte la mort de ce dernier. Les espèces parasites sont surtout des champignons microscopiques.

Deux types de symbiose existent entre les champignons et les végétaux : 

  • Ectomycorhize : Symbiose de type mutualiste entre la racine d’une plante et une colonie de champignons, les hyphes de ces derniers s’infiltrant entre les cellules racinaires.
  • Endomycorhize : Symbiose entre la racine d’une plante et une colonie de champignons, les hyphes de ces dernierss’infiltrant à l’intérieur de la cellule végétale.

90% des végétaux ne pourraient se nourrir sans les champignons  qui donnent de l’eau, des sels minéraux et des nutriments aux végétaux, en échange de quoi les végétaux  fournissent des sucres aux champignons des sucres. Seuls les Brassicaceae (famille des choux) ont perdu cette capacité symbiotique et s’alimentent seuls dans un sol riche. 

Les champignons au service de l’Homme 

Le formidable équipement enzymatique des champignons les rend très importants pour l’homme qui  valorise ces organismes dans des domaines très variés : 

  • biodépollution, recyclage (matières plastiques,  colorants  industriels,  pesticides,  toxines, métaux lourds, hydrocarbures…),  
  • production  industrielle : biocatalyse de polymères, blanchiment non polluant de la pâte à papier, production de biocarburants, produits alimentaires comme les arômes, produits fermentés, métabolites primaires ou secondaires et médicaments (Cordoba & Rios, 2012 ; Hofrichter, 2010 ; Golan-Rozen et al., 2011 ; Prasad et al., 2010 ; Zhang et al., 2015). 
  • Dans l’alimentation, il ne faut pas oublier que sans champignon, on ne pourrait pas  consommer d’alcool et de bière (Chebli, 2016), de pain, de fromage  (Saccharomyces cerevisiae, Penicillium roqueforti, Aspergillus oryzae, Mucor fuscus…).  
  • Pour les médicaments,  de nombreux  principes actifs sont  issus des  champignons ou obtenus grâce à leur intervention sur un précurseur. Citons par exemple des antibiotiques (pénicilline G issue  de Penicillium notatum, céphalosporines issues de Cephalosporium acremonium, acide fusidique issu de Fusidium coccineum),  des antifongiques  (griséofulvine issue  de P.  griseofulvum),  des hypocholestérolémiants (simvastatine  issue d’Aspergillus terreus),  des immunosuppresseurs  (ciclosporine  issue de Tolypocladium inflatum), des anticancéreux (paclitaxel issu de l’association de l’if et d’un champignon endophyte), des alcaloïdes ergoliniques dérivés  de l’ergot de seigle (Claviceps purpurea), des stéroïdes dont l’ergostérol,  précurseur  de la  vitamine D2  (Bakhtiari  et al., 2003 ;  Barreira et al.,  2014 ; Demain  & Zhang,  1998  ;    Heinig et al., 2013).

Quelques champignons célèbres : 

  • Sir Alexander Fleming fut le premier à démontrer que la moisissure Penicillium notatum synthétisait une substance antibactérienne ; il fut le premier à concentrer cette substance qu’il appela « pénicilline ». Il ne fut pourtant pas celui qui conduisit le développement de la pénicilline, ni le premier à utiliser ses propriétés chez l’être humain. C’est un cas emblématique de découverte faite par sérendipité. Source wikipédia
  • Penicillium roqueforti est une espèce de champignons ascomycètes saprophytes, très répandue dans la nature. Son principal usage fermier, artisanal ou industriel est la transformation laitière attachée aux fromages à pâte persillée comme le roquefort, la fourme d’Ambert, la fourme de Montbrison, le bleu d’Auvergne, le bleu des Causses, le bleu du Vercors-Sassenage, le bleu d’Élisabeth, le Blue Stilton, etc.  Source wikipédia
  • Penicillium camemberti est une espèce de champignons ascomycètes. Il est utilisé pour la fabrication du camembert et du brie. C’est lui qui produit la croûte du fromage faite de filaments blancs (moisissure). Ce champignon est également utilisé pour la préparation de camembert végétal (végane). Il peut également produire de l’acide cyclopiazonique, une mycotoxine dangereuse pour la consommation humaine et animale. Source wikipédia
  • Saccharomyces cerevisiae est une espèce de levures employée notamment dans la fermentation de la bière. Elle occupe une place particulière parmi les ferments, levains et levures utilisés depuis la Haute Antiquité : de nombreux peuples, tels que les Égyptiens, Babyloniens ou Celtes, l’utilisaient pour la fabrication de boissons fermentées, du pain, du kéfir, du vin et de la bière de fermentation haute. Cette espèce a été découverte, isolée et identifiée au milieu du xixe siècle par des brasseurs hollandais à la demande de la corporation des boulangers parisiens qui commençaient à industrialiser leur production et cherchaient pour leur pain un procédé de fermentation plus fiable et plus rapide que leur levain traditionnel. Ainsi dans ces domaines, certains mélanges de ses différentes souches sont appelés « levure de boulanger » et « levure de bière ». Source wikipédia 

Et les lichens ?

Les lichens, également appelés champignons lichénisés ou champignons lichénisants, résultent d’une symbiose permanente entre au moins un champignon hétérotrophe appelé mycobionte, et des cellules microscopiques photoautotrophes, possédant de la chlorophylle, nommées photobiontes. Ce sont des organismes composites. Le mycobionte est prépondérant dans la plupart des genres. Le photobionte s’appelle phycobionte lorsque le partenaire est une algue verte, cyanobionte ou bactériobionte lorsqu’il est une cyanobactérie. Les lichens sont classés dans le phylum des Fungi. La symbiose résulte d’une association, appelée lichénification ou lichénisation. L’inverse, c’est-à-dire une algue macroscopique hébergeant un champignon microscopique, est une mycophycobiose.

Les lichens vitvent souvent dans des endroits extrêmes : en haut des montagnes, sur les rochers du bord de mer, sur la lave refroidie, sur les toits brûlants…Les lichens sont aplatis ou barbus, jaunes, oranges, ou noirs ! On en connaît plus de  20 000 espèces. Le champignon protège l’algue. Il lui donne de l’eau et des sels minéraux. L’algue fabrique, par photosynthèse des sucres et d’autres produits, qu’elle partage avec le champignon. C’est une symbiose.


Bibliographie

  1. Biodiversité et évolution du monde fongique – Jean-Christophe Guéguen et David Garon
  2. Les champignons redécouverts – Fabienne Malagnac, Philippe Silar
  3. Les goûts et les couleurs du monde – Marc-André Selosse
  4. Jamais seul – Marc-André Selosse
  5. L’origine du monde – Marc-André Selosse
  6. Positive citation bias and overinterpreted results lead to misinformation on common mycorrhizal networks in forests.

3 réflexions sur “Chapeau, les champignons !

  1. Merci Michel pour ce résumé et les nombreux compléments que tu as ajoutés.
    J’ai une question concernant les lichens.
    Il était classique pour moi de dire que les lichens étaient une symbiose d’un champignon et d’une algue . Je crois avoir compris hier soir qu’il pouvait s’agir aussi d’une symbiose entre un champignon et une bactérie ??? Est-ce que j’ai mal compris, ou est-ce vraiment ce qu’il a dit ?
    Alain

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    • Bonsoir Alain. N’en sachant pas plus que toi, j’ai sollicité Wikipédia : Les lichens appelés aussi champignons lichénisés ou champignons lichénisants, résultent d’une symbiose permanente entre au moins un champignon hétérotrophe appelé mycobionte, et des cellules microscopiques photoautotrophes, possédant de la chlorophylle, nommées photobiontes. Ce sont des organismes composites. Le mycobionte est prépondérant dans la plupart des genres. Le photobionte s’appelle phycobionte lorsque le partenaire est une algue verte, cyanobionte ou bactériobionte lorsqu’il est une cyanobactérie. Les lichens sont classés dans le phylum des Fungi. La symbiose résulte d’une association, appelée lichénification ou lichénisation. L’inverse, c’est-à-dire une algue macroscopique hébergeant un champignon microscopique, est une mycophycobiose.
      ➜ j’ai modifié l’article en conséquence ! Merci !

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  2. Pingback: Bonjour les champignons ! | Mirabilia naturae

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